Chaire collective de recherche France/Québec sur les enjeux contemporains de la liberté d’expression

Chaire collective de recherche France/Québec sur les enjeux contemporains de la liberté d’expression

La liberté d’expression est plurielle à plus d’un titre, d’abord par les nombreuses formes qui l’incarnent (politique, religieuse, académique, artistique), mais aussi par les contours variables qu’elle reçoit d’une société à l’autre, fruit d’une pondération contextuelle qui révèle à chaque fois un ensemble de choix en matière de normes et de valeurs. La présente Chaire entend relever le double de défi de cette pluralité :

1) étudier la liberté d’expression en insistant sur ses manifestations diverses et parfois contradictoires ;

2) veiller à montrer, grâce à une approche comparative, ce qui distingue la société québécoise des autres sociétés quant à sa manière particulière d’articuler les différents visages de la liberté d’expression.

Le premier axe qui retiendra l’attention de la Chaire portera sur la question de la régulation juridique des usages préjudiciables de la liberté d’expression. Sans être impuissant, le droit suscite des attentes élevées qui font souvent le lit de déceptions correspondantes. Après avoir considéré les succès et les limites des régulations juridiques existantes, nous évaluerons les promesses qui accompagnent les nouvelles propositions d’intervention, notamment dans le contexte technologique contemporain. Nous montrerons la difficulté, pour le législateur, de tracer une ligne entre les contenus expressifs susceptibles de bénéficier de l’encadrement d’une règle de droit et ceux qui gagnent à être laissés à la contrainte plus informelle de l’autorégulation éthique.

Le deuxième axe de la Chaire abordera quant à lui le domaine de l’expression spirituelle et religieuse : comment les identités religieuses et non-religieuses cohabitent-elles dans un contexte de renégociation de l’espace du dicible et du représentable ? La relation de la religion à la liberté d’expression est complexe et plurivoque : si dans certains cas ce sont les sensibilités religieuses qui cherchent à contraindre la parole (cas du blasphème), une certaine conception du rôle du religieux dans la société tend au contraire à limiter l’expression religieuse (querelle de la laïcité).

Le troisième axe se penchera sur les injonctions paradoxales qui pèsent sur la liberté d’expression en contexte académique. L’exercice de la liberté académique entre-t-il nécessairement en contradiction avec le droit de chacun au respect de sa dignité ? La prise en compte des valeurs d’équité, de diversité et d’inclusion s’accompagne-t-elle nécessairement d’un risque d’autocensure ? Quel équilibre permet de conjuguer respect d’autrui et avancement de la connaissance ? Il s’agira de répondre à ces questions tout en gardant à l’esprit que les lois du marché imposent leurs propres limites à la liberté académique.

Dans le cadre d’un quatrième et dernier axe, la Chaire abordera l’épineux problème de la liberté de création : le territoire de l’art, loin d’être autonome, se trouve borné par des frontières multiformes. L’État, la société, le marché et les scrupules éthiques des artistes eux-mêmes sont autant de forces qui en régulent les manifestations.

Chacun des axes sera abordé non seulement dans une perspective pluridisciplinaire, mais avec le souci constant d’éclairer le grand public, les chercheurs, les décideurs et la société civile sur les enjeux contemporains de la liberté d’expression.

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