La pratique du portrait littéraire : entre mémoire et innovation
Ce projet de recherche-création porte sur le portrait littéraire, c’est-à-dire la description physique (corps et visage) des personnages dans l’écriture créative. Cette forme résiste particulièrement à l’innovation, puisque les personnages ont été décrits dans la tradition littéraire jusqu’à épuisement, de façon à ce que les mêmes formules reviennent sans cesse, si bien ancrées en nous qu’elles sont inconsciemment convoquées : les regards s’éclairent et s’éteignent, activé par l’interrupteur des humeurs; les mentons sont « fuyants », les bouches « généreuses », les nez « aquilins ». Ces descriptions ne peuvent par ailleurs jamais être exhaustives : les auteur·rices doivent se contenter de noter quelques traits, suspendus dans l’imagination des lecteur·rices comme le sourire du chat de Cheshire, à qui on laisse le soin de reconstituer un visage. Si le portrait littéraire connaît son apogée dans le roman réaliste au 19e siècle, où la pause descriptive lors de la rencontre d’un nouveau personnage apparaît comme un exercice obligé, la forme est vite apparue dépassée face aux nouveaux moyens de représentation (photographie et cinéma se développent et donnent à voir beaucoup plus facilement que le texte). Comment alors, en tant qu'auteur·rices, se réapproprier cette forme, et conjuguer le poids de la tradition qu’elle transporte avec l’injonction d’originalité qui plane sur toute activité créatrice? Ce projet vise à interroger la part de reconduction inconsciente des codes littéraires dans tout processus d’écriture, à documenter le processus de retravail de ces passages et à répertorier les différentes stratégies de renouvellement de la forme du portrait employées en littérature québécoise, à tester leur efficacité et à en développer de nouvelles.
Chercheur principal
Financement
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Soutien à la recherche-création pour la relève professorale (FRQSC)
2024-05-01 - 2027-06-01